peintures de 2000 à 2010






hommage à Mr Le Gray - h/t - 162x130 cm




Une peinture du silence.


Le monde clos de Patrick Devreux est celui de ses intérieurs, dont il nous transmet la poésie dans le miroir d’une réalité transposée. Quelle vraisemblance physique attendre de la peinture, hors celle inhérente à son expression fusionnelle entre la matière et l’esprit, entre la pâte et la lumière ? Le sujet fixe des formes intemporelles sansperdre de sa vérité. La toile devient le lieu de l’infini où se consume toute velléité d’illusion. La volonté de s’interdire tout recours au réalisme, amène l’artiste à dépouiller ses thèmes, limités aux intérieurs et au nu.
Ses intérieurs sont en symbiose avec sa quête d’une compénétration objet-lumière-espace pour s’inscrire dans une délimitation formelle plus souple, conséquence de son choix d’une peinture tonale, (à l’instar d’un Vermeer, d’un Chardin), ravivée par l’introduction récente de tons montés, un rouge, un jaune. Sa palette, volontairement réduite, dont on devine qu’elle appartient à un ordre puriste, génère un mystère médité.Les contours s’estompent pour privilégier l’émergence d’une manière plus expansive, généreuse et retenue dans la façon dont Patrick Devreux suggère l’enfermement compact des choses dans un temps suspendu. Dans ces intérieurs, d’essence janséniste, dont le dépouillement s’accorde aux tonalités de gris ombrés, de vert cendré, de bleu coulant tel un halo, la lumière réveille le dessin, illumine ce décor sans produire aucune ombre. Les volumes hésitent entre l’affirmation de leur enveloppe et leur dissolution dans la lumière transparente qui donne à l’ensemble de la composition une vérité immobile.
Une peinture de l’effusion.
Que voit-on dans ces scènes vidées de toute présence, à de rares exceptions où un nu féminin, placé de dos, s’encadre dans une porte ouverte ? Dans la pièce, réduite à un parallélépipède dont la division par plans simultanés, créée des diversions visuelles au sein d’une unicité plastique et spatiale, l’air circule avec un naturel troublant. D’une surprenante impassibilité, ce lieu familier qui affiche cependant la banalité
de l’anonymat, est celui du peintre, pour qui sa maison est le centre du monde et l’atelier, a fortiori, son propre et unique univers. D’une peinture à l’autre on retrouve le canapé, le fauteuil crapaud, les chaises, le lavabo vu dans l’entrebâillement de la porte, un fragment de baignoire. Un tableau est accroché sur le mur. Rappel discret que la peinture, dont on reconnaît intuitivement l’évocation du sujet, est le pouls, au rythme duquel vit la demeure. Par elle, tout commence et par elle tout est dit. A commencer par l’espace. Patrick Devreux interroge la complémentarité, dedans dehors. Afin de jouer avec l’illusionnisme de la profondeur, sans faire appel aux lois de la perspective albertienne, ni à la découpure stricte de l’espace, il introduit un miroir. Cet élément métaphorique, récurrent, traversant toute l’histoire de la peinture, dispense une présence du temps.
Celle de la durée subrepticement emprisonnée, que l’artiste, sous une apparente simplicité, maîtrise par le fabuleux pouvoir de la peinture. Là où domine la frontalité, le champ visuel se nourrit de recherches continuelles. Le chromatisme de Patrick Devreux confronte les tons sourds et profonds des terres, relevées de rouge, d’ocre jaune, à des tons plus vifs, d’une densité lumineuse au plus près de l’immatérialité de la couleur. Cette gangue réfléchissante, sans jamais diluer l’image, la déplace dans un univers autre, où le poids des choses ne s’évalue pas à leur lisibilité mais à leur détachement de la réalité tangible. Le vide habité, tel est bien ce qui nous séduit en regardant ces fragments de salon, de chambre, ou bien ce hall d’une rigoureuse construction orthogonale.
Dans son combat avec l’illusion d’un vide habité, le huis clos métaphysique convoque le nu. Devreux n’attend-il pas de son art qu’il suggère le vrai, autant que sa substance charnelle et poétique. Alors que la ligne délimite un corps, d’une improbable identité – Devreux dit ne pas peindre des personnages, mais des corps – la saveur matiériste introduit un sentiment légitime d’éternité. Travaillé dans la lumière, le corps, allongé, (il semble parfois comme en apesanteur) en est le réceptacle, l’épiphanie et le refuge. Alentour, la sérénité des bruns et des blancs rosés, l’alliance des gris et du blanc sont une des réponses apportées par une humilité picturale, sublimée par sa légitimité. La touche vibrante en est une autre, dans sa capture de la lumière qui fonctionne comme une cristallisation du réel.
Le silence résolu de la démarche de Patrick Devreux est fait de mesure contenue et d’équilibre. Si son pinceau ose des hardiesses de tons rares, des orangés, des verts, des effluves denses animent la trame de pulsions picturales amoureusement mûries. Des spectres hantent ces espaces de l’infini. Les nus répondent à ces présences pour dialoguer à la première personne du temps de l’infini.


© Lydia HARAMBOURG

Décembre / catalogue de la galerie ARTFRANCE
2006

enlacé - h/t - 89x116 cm




chambre à Fuente Nueva - h/t - 100x100 cm



le soir sur le divan - h/t - 81x100 cm



la baignoire 1 - h/t - 73x92 cm



corps offert - h/t - 93x72 cm



contre le mur - h/t - 146x114 cm



un aprés-midi, l'été - h/t - 130x97 cm



la maison au repos - h/t - 116x89 cm



dans le riokan - h/t - 73x92 cm



la chambre dans la glace - h/t - 130x162 cm




seule - h/t - 195x130 cm




la chambre à Bamako - h/t - 130x162 cm






 l'entrée à Pors Carn





l'après-midi à St Gué





à la Gomera - h/t - 130x162 cm